Dans une case, une femme se désespérait. Elle ne pouvait avoir d’enfant. Elle avait consulté tous les marabouts de grande renommée, sans aucun succès. Elle était l’objet de raillerie de ses voisines et de ses amies. Sa stérilité était l’objet de quelque obscur sort jeté le jour où, petite fille, elle s’était assise à califourchon sur un mortier. Ce geste avait été fait dans une grande innocence. Après avoir pilé le mil pendant des heures avec ses amies, ses sœurs et ses cousines, elle avait voulu se reposer. Pour éviter de s’asseoir sur le sol, elle s’était mise à califourchon sur le mortier couché. Elle avait sursauté devant les cris de sa mère et de ses voisines. Pendant des jours, des sacrifices et des bains rituels avaient été faits pour apaiser le courroux des ancêtres. En vain. Le geste avait été trop grave. Les anciens s’étaient réunis sous l’arbre à palabre pour débattre de ce sacrilège. Les dieux avaient décidé. Elle ne porterait aucun enfant humain. Ce dernier serait maudit à jamais et souillerait la terre. Elle devait être bannie. Après moult sacrifices, son grand-père avait réussi à obtenir un bannissement temporaire. Pendant sept ans, elle avait vécu dans la forêt, ignorée de tout le village. Ceux qui la croisaient détournaient les yeux et évitaient de marcher sur son ombre.