J’adore partager mes souvenirs d’enfance avec les enfants de la famille, avec des amis. C’est ainsi que j’en suis arrivée à parler musique car j’avais un souvenirs récurrent: mes premiers cours de musique à l’école des sœurs, dans ma ville de cœur: Saint-Louis du Sénégal.
Je devais avoir quatre ans. J’étais à la Petite Maternelle. Ce matin-là, nous avions musique; solfège, gammes, avec le professeur au piano. Un immense piano noir tout au fond de la classe. A tout de rôle, nous devions écrire une note au tableau et la lire ou la chanter. Quand mon tour est arrivé, du haut de mes trois pommes et demie, j’écrivis fièrement ma note et je me suis fait vertement réprimander par la maîtresse. Elle me demanda de recommencer. Encore et encore. Le ton se durcissant de plus en plus à chaque essai. Au point qu’elle devint hystérique.
Le souci est que je ne comprenais pas. J’étais terrifiée et en pleurs. Finalement, je refusais simplement d’écrire cette maudite note. Je me retrouvais au coin avec interdiction d’approcher le piano et de participer aux cours de musique. A chacun des cours, j’étais désormais persona non grata aux abords du piano. Avec interdiction de sortir de la pièce même pour aller aux toilettes. Même actuellement, je revois mes camarades chantant dans la salle de musique, tandis que j’étais debout, au coin, dans la salle à côté, avec interdiction de m’asseoir. Avec le recul, je pense qu’en tant que dyslexique qui s’ignorait, j’ai dû écrire la note à l’envers ou à moitié ou pire encore. Ce qui me fait sourire voire rire actuellement, c’est que j’étais si fière de ma note de musique. Je l’aurai volontiers encadrée avec plaisir et hurlant « c’est moi qui l’ai fait » avec un magnifique sourire. Tant pis pour cette maîtresse qui n’a pas su déceler l’artiste qui sommeillait en moi.
Amélie Diack Antony, le 13 décembre 2019